Laurent Frölich avocat assistance marchés publics et  droit avocat délégation de service public et  droit de la fonction publique, Paris et Lille

Arrêt du Conseil d'Etat "Commune de Belleville"

Arrêt du Conseil d'Etat "Commune de Belleville" du 3 octobre 2014 [lien Arrêt]

Dans cet arrêt le Conseil d’État va plus loin dans le contrôle de la méthode de notation des offres et rappelle que la méthode de notation des offres ne doit pas avoir pour effet de priver les critères de sélection de leur portée ou de neutraliser leur pondération.
Les modalités de mise en œuvre des critères de notation n’ont pas à être communiqués aux candidats (C.E. 2 août 2001, « Syndicat Mixte de la Vallée de l’Orge Aval, req. n° 348.711) pas plus que les éléments d’appréciation des offres des candidats (C.E. 21 mai 2010, « Commune d’Ajaccio », req. n° 333.737).
En revanche, la méthode de notation des offres peut être contestée devant le juge du référé précontractuel en cas d’erreur de droit ou de discrimination légale.
 Par un arrêt du 29 octobre 2013 « OPH Val d’Oise Habitat » (req. n° 370.789) le Conseil d'Etat a jugé :

  • « 3. Considérant, en premier lieu, que la méthode de notation des offres ne peut être utilement contestée devant le juge du référé précontractuel qu'en cas d'erreur de droit ou de discrimination illégale ;
  • 4. Considérant que la méthode de notation du critère du prix doit permettre d'attribuer la meilleure note au candidat ayant proposé le prix le plus bas ; que le juge des référés a relevé, sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier, que la méthode retenue par Val d'Oise Habitat pour noter le critère du prix avait pour effet d'attribuer la note la plus faible au candidat ayant présenté le prix le plus éloigné de l'estimation du coût de la prestation opérée par le maître d'oeuvre, que ce prix soit inférieur ou supérieur à l'estimation, et, ainsi, avait eu pour conséquence d'attribuer la note maximale à la société déclarée attributaire du marché, alors même que sa proposition de prix était supérieure à celle de la requérante ; »

Ainsi, le juge administratif peut être conduit à invalider les méthodes de notation des offres qui sont de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre.

Récemment, par l’arrêt du 3 novembre 2014 « Commune de Belleville » (req. n° 373.362), le Conseil d’Etat a donc jugé :

  • « 2. Considérant, en premier lieu, que le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il a définis et rendus publics ; que, toutefois, ces méthodes de notation sont entachées d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elles sont par elles-mêmes de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie ; qu'il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n'y est pas tenu, aurait rendu publiques, dans l'avis d'appel à concurrence ou les documents de la consultation, de telles méthodes de notation ;
  • 3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les critères d'attribution des quatre lots du marché litigieux étaient, pour deux d'entre eux, le prix et la valeur technique, et, pour les deux autres, le prix, la valeur technique et les délais d'exécution ; que le règlement de la consultation prévoyait que, pour la mise en œuvre du critère du prix, chaque offre serait notée en fonction de son prix (P) et du prix de l'offre la plus basse (P0) selon la formule : 10/3 x (7 - P/P0) ; qu'en relevant qu'une telle méthode de notation avait pour effet de neutraliser les écarts entre les prix de sorte que les offres ne pouvaient être différenciées qu'au regard des autres critères de sélection et qu'elle était ainsi susceptible de conduire à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie et en déduisant que cette méthode était entachée d'irrégularité, la cour n'a commis aucune erreur de droit ; »

 
Le juge contrôle donc, dans cette logique, la formule mathématique utilisée pour la méthode de notation des offres pour vérifier que celle-ci ne neutralise pas les écarts entre les prix rendait de ce fait inopérant le critère du prix par rapport aux autres critères.