Laurent Frölich avocat assistance marchés publics et  droit avocat délégation de service public et  droit de la fonction publique, Paris et Lille

La demande de résiliation pour ordre de service tardif ne dispense pas le titulaire d’adresser une copie de son mémoire en réclamation au maître d’œuvre

Conseil d'État, 7ème chambre, 3 février 2021, n°442844, Inédit au recueil Lebon
 
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat affirme que la demande de résiliation pour ordre de service tardif formulée en application de l’article 46.2.1 du CCAG travaux ne dispense pas le titulaire d’adresser une copie de sa réclamation au maître d’œuvre, en application de l’article 50.1.1 du même CCAG.
 
Le Grand port Maritime de Marseille avait conclu avec une société un marché public portant sur des travaux de dragage d'entretien des postes d'attente fluviaux sur les bassins ouest du port de Marseille.
 
Le titulaire du marché avait demandé la résiliation du marché pour ordre de service tardif en application de l'article 46.2.1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux).
 
Le Grand port Maritime ayant rejeté sa demande, elle lui a adressé un mémoire contestant ce refus et réclamant l'indemnisation de son préjudice.
 
Le Grand port Maritime de Marseille a par la suite décidé de résilier le marché aux torts de cette entreprise.
 
Le titulaire a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à ce qu'il prononce la résiliation du marché pour ordre de service tardif et condamne le Grand port maritime de Marseille à lui verser une indemnité de 1 432 215,07 euros. Ayant été condamné en première instance à verser une indemnité de 516 316,78 euros TTC en compensation des frais engagés pour assurer l'exécution du marché, le Grand port Maritime de Marseille a saisi la cour administrative d’appel qui a rejeté l'appel principal du Grand port maritime de Marseille et a fait droit partiellement à l'appel incident du titulaire en portant son indemnité à 644 656,14 euros.
 
Pour rejeter la fin de non-recevoir opposée par le Grand port maritime de Marseille tirée de ne pas avoir adressé une copie de sa réclamation au maître d’œuvre en vertu des dispositions de l’article 50.1.1 du CCAG Travaux,  la cour administrative d'appel de Marseille a relevé que la méconnaissance de cette formalité ne saurait, dans les circonstances très particulières de l'espèce, être regardée comme substantielle et de nature, en conséquence, à affecter la recevabilité de sa réclamation, dès lors que si la résiliation litigieuse du contrat avait été prononcée par le Grand port maritime de Marseille aux torts de la société requérante, cette décision faisait suite à une demande de résiliation de sa part, qui aurait dû être traitée dans le cadre de la procédure de l'article 46.2.1 du cahier des clauses administratives générales, laquelle n'impose pas l'envoi d'une copie de la demande d'indemnisation au maître d'œuvre.
 
Le Conseil d’Etat invalide le raisonnement de la Cour et estime au contraire que les stipulations de l'article 46.2.1 ne sauraient avoir pour effet de dispenser le titulaire de respecter la formalité prévue par les stipulations de l'article 50.1.1 du CCAG lorsqu'il transmet au maître d'ouvrage une réclamation en application de ces dernières stipulations, quand bien même il aurait préalablement demandé la résiliation du marché pour ordre de service tardif.