Laurent Frölich avocat assistance marchés publics et  droit avocat délégation de service public et  droit de la fonction publique, Paris et Lille

La nullité d’un contrat de concession est-elle prononcée si des droits de redevances d’entrée et/ou de sortie sont perçus de manière injustifiée ?

CE, 10 juillet 2020, Commune de la Guérinière, n°434353 
 
La commune de La Guérinière avait confié, par une DSP, à la société les Moulins l’exploitation du camping municipal. Le maire de la commune a résilié la convention aux torts exclusifs de la société, par une décision du 13 février 2015.
 
La société Les Moulins a saisi le juge administratif afin de constater la nullité de la convention et condamner la commune à lui verser une somme correspondant aux redevances dont la société s’était acquittée durant toute la durée de la convention.
 
Le principe de loyauté contractuel…
 
Le CE a rappelé le principe posé par sa jurisprudence Béziers I (CE, Assemblée, 28 décembre 2009, Commune de Béziers, n° 304802) : le juge, saisi d’un litige relatif à l’exécution d’un contrat doit faire application du contrat, au regard de l’exigence de loyauté contractuelle.
 
L’application du contrat peut être écartée seulement si le juge constate une irrégularité  dans le contenu du contrat ou un vice d'une particulière gravité.
 
un principe qu’il convient de protéger.
 
La CAA de Nantes avait qualifié la convention du 27 décembre 2007 de délégation de service public et a ainsi pu appliquer l’article L. 1411-2 du Code général des collectivités territoriales, prévoyant que : « Les montants et les modes de calcul des droits d'entrée et des redevances versées par le délégataire à la collectivité délégante doivent être justifiés dans ces conventions (...) ». La CCA de Nantes en a ainsi déduit l’inapplication de la convention, du fait que cette dernière ne comportant pas de justification du montant ou du mode de calcul de redevance prévu dans le contrat cela constituait alors un vice d’une particulière gravité.
 
Le CE a estimé que la CAA a commis une erreur de qualification juridique en énonçant que la méconnaissance de l’article L. 1411-2  du CGCT justifiait l’inapplication de la convention.
 
Il a ajouté que l’absence de justification du montant et de mode de calcul des droits de redevances dans un tel contrat : « ne donne pas un caractère illicite au contrat ni n'affecte les conditions dans lesquelles les deux parties ont donné leur consentement et peut, au demeurant, être régularisé. ».  La commune de la Guérinière est donc tout à fait fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué.
 
Ainsi, selon le CE, l’absence de justification, dans le contrat de concession, du montant ou du mode de calcul des droits de redevance d’entrée et/ou de sortie n’entraîne pas la nullité d’un contrat de concession.
 
En réalité, le CE s’est avant tout assuré que la survenance d’un litige causé par des « détails » du contrat de concession tels que la justification des droits de redevance ne vienne pas bouleverser le principe de loyauté contractuelle.