Laurent Frölich avocat assistance marchés publics et  droit avocat délégation de service public et  droit de la fonction publique, Paris et Lille

Un rappel du champ de compétence du juge des référés précontractuels limité aux obligations de publicité et de mise en concurrence

TA Paris, ord. 13 novembre 2020, Sté Acrobat, n°2016800
 
Le juge administratif a rejeté la requête d’une société critiquant la composition d’un groupement dans le cadre d’un référé précontractuel.
En l’espèce, la préfecture de la région Ile de-de France avait lancé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la conclusion d’un accord-cadre, ayant pour objet la couverture des besoins en travaux courants des bâtiments des services et des établissements publics adhérents à un groupement, composés de seize administrations.
La société Acrobat, candidate évincée, a estimé illégal l’objet de cette consultation dès lors qu’il prévoit de répondre au besoin de seize membres adhérents à un groupement de commande alors que pour le précédent marché dont elle était attributaire, le groupement était constitué de cinquante personnes et non seize.
 
Le juge administratif rappelle l’article L. 2113-6 du Code de la commande publique, qui énonce que : « Des groupements de commandes peuvent être constitués entre des acheteurs afin de passer conjointement un ou plusieurs marchés ».
Il cite également l’article L. 2113-7 du même code, qui dispose que :« La convention constitutive du groupement, signée par ses membres, définit les règles de fonctionnement du groupement. Elle peut confier à ’un ou plusieurs de ses membres la charge de mener tout ou partie de la procédure de passation ou de l’exécution du marché au nom et pour le compte des autres membres. / Les acheteurs membres du groupement de commandes sont solidairement responsables des seules opérations de passation ou d’exécution du marché qui sont menées conjointement en leur nom et pour leur compte selon les stipulations de la convention constitutive ».
 
En s’appuyant sur ces dispositions, le juge énonce que le moyen soulevé par la requérante relatif à la composition du groupement en cause « concerne la liberté, pour des acheteurs publics, de se regrouper en vue d’assurer la mutualisation de leurs achats » qui n’entre pas dans le champ des obligations de publicité et de mise en concurrence s’imposant au pouvoir adjudicateur ».
Ainsi, un requérant ne peut pas critiquer la composition d’un groupement de commande dans le cadre d’un référé précontractuel, dès lors que cette composition ne relève pas des obligations de publicité et de mise en occurrence incombant à l’acheteur.
 
 
TA Paris, ord. 10 novembre 2020, Sté X, n°2017072
 
Le juge administratif rappelle dans cette ordonnance que le moyen tiré de l’existence d’une entente entre attributaires (article L.420-1 du code de commerce) ne relève pas de l’office du juge des référés précontractuels
 
En l’espèce, un office public de l’habitat a lancé un appel d’offres ouvert pour la passation d’un accord cadre à bons de commande ayant pour objet la fourniture de produits d’entretien et d’équipements nécessités par l’épidémie de Covid 19. Ce marché comportait 3 lots. La société requérante a demandé l’annulation de l’attribution des lots n°1 et n°2, au motif que ces lots ont été attribués à deux sociétés présentant des liens familiaux et structurels, révélant selon elle l’existence d’une entente prohibée par l’article L. 420-1 du Code du commerce.
 
Le juge administratif a considéré que : « En troisième lieu, la méconnaissance éventuelle des dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce n’est pas au nombre des manquements mentionnés à l’article L. 551-1 du code de justice administrative dont il appartient au juge du référé précontractuel de connaître ».
 
Ainsi, il a confirmé sa position selon laquelle le juge des référés précontractuels est compétent seulement pour connaître des atteintes aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Les atteintes au droit de la concurrence n’entrent donc pas dans son champ de compétence (CE, 14 mars 2003, Société Air Lib, req. n° 251610 ; TA Lyon 21 octobre 2013, SA GDF SUEZ ENERGIE SERVICES-COFELY, req. n°1306637).
 
Le juge des référés précontractuels du Tribunal administratif de Versailles a, le même jour, également statué en ce sens (TA Versailles, 10 novembre 2010, Société X, n°2006915).
 
Ces ordonnances de référé rappellent le cantonnement du juge des référés précontractuels aux moyens relatifs à la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant au pouvoir adjudicateur, excluant de ce fait sa compétence pour connaître de la composition des groupements de commande et des ententes anticoncurrentielles lors de la passation d’un marché procédure.